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Musique et théâtre - Page 8

  • Rigoletto

    A l'opéra Bastille.

    Pourquoi Rigoletto ne veut-il pas dire son nom à sa propre fille, Gilda ? D'où vient l'étrange nom, Gualtier Maldè, que le Duc de Mantoue invente pour séduire la jeune fille ? Le mélodrame s'achève, Rigoletto tue sa fille au lieu du Duc sans que ces mystères (peut-être obscurément liés) ne trouvent leur explication.  

  • Mansions

    Il n'est pas facile de décrire le principal élément de décor de cette production de Pelléas et Mélisande (photo d'ensemble, ici). Disons : une (demie) amphore géante, couchée sur le flanc, ouverte selon une coupe longitudinale. La chose tourne sur elle-même. D'un côté, on peut entrer dans la concavité avec une petite échelle et se tenir dans le ventre ou dans le col. De l'autre (la face convexe), un escalier et un balcon métalliques sont arrimés sur la panse ; l'échafaudage permet de grimper jusque sur le goulot d'où l'on peut, traversant le plan de coupe, se pencher sur la face ultérieure.

    (Je ne sais pas si la composition est inspirée du sonnet Surgi de la coupe et du bond - auquel Maeterlinck emprunte peut-être sa "rose dans les ténèbres" - mais la matière en est charnelle et rouge et non d'une verrerie éphémère.)

    Je ne me souviens pas de tous les usages et arrangements qu'autorise cette topographie complexe. Les personnages sont trop souvent rejetés sur les bords par l'encombrement et condamnés à tourner en rond autour de l'installation. Mais la scène de la tour, Mélisande perchée sur le col, Pelléas enfermé dans le vase, était très belle. Dans le dernier acte, Mélisande et Golaud sont tout deux installés dans la grande cavité : elle sur le bord, lui derrière. Golaud, se couchant, se relevant, est prisonnier d'un espace sans sol et sans perspective. Perdu dans la profondeur sans repère, il ne peut atteindre Mélisande qui lui tourne le dos (de même qu'il "ne saura jamais, qu'il va mourir ici sans savoir".)

     

  • Le massacre des innocents

    Le Massacre des innocents de Bruegel dans l’exposition des collections royales britanniques au musée de Bruxelles. Alors que le tableau était dans les collections de l’empereur Rodolphe II, les enfants massacrés ont été couverts par des repeints et remplacés ou bien par des ustensiles et des ballots ou bien par des animaux, une oie, un veau, et l’épisode biblique a été transformé, par euphémisme, en une scène de pillage.  La peinture a été détériorée et le sens est perdu.

    A contrario, dans la mise en scène de Pelléas et Mélisande à la Monnaie, à l’acte IV, les moutons dont les pleurs intriguent tant Yniold (Ce n’est pas le chemin de l’étable, où vont-ils dormir cette nuit ?) sont figurés par des enfants tenus en laisse. Ici le sens est outré (les moutons sur le chemin de l’abattoir représentent les innocents massacrés donc ce sont des enfants) et la vision au lieu d’annoncer le meurtre de Pelléas l’excède et le dévalue.

  • Pelléas et Mélisande

    Théâtre de la Monnaie.

    C'est, pour une fois, à l'occasion de cette représentation, la voix Pelléas qui m'a semblé la plus forte, la plus présente. Elle ne trahissait pas pour autant le personnage qui restait certes "un peu étrange", intimidé, velléitaire, incapable longtemps de franchir le pas ; elle le faisait même apparaître bavard (je ne le dis pas en mauvaise part) : les paroles précipitées témoignent de son agitation ; il m'a semblé que Mélisande parlait à peine dans la dernière scène qui les réunit. (Et ce soliloque s'inscrivait bien, alors, dans la suite de celui d'Arkel et de Golaud : car, dans le quatrième acte, successivement,  les trois hommes (les trois "âges") entreprennent Mélisande ; et celle-ci, malgré sa préférence, ne rejette personne).

    Golaud, à proportion (la substance des deux hommes est-elle incompatible ?), s'effaçait et semblait rejeté à la marge (alors que, dans les autres productions, il était toujours apparu comme le personnage le plus humain du drame, celui qui est présent du début à la fin et qui détermine l'événement).

  • Eugène Onéguine

    A l'opéra Garnier.

    Une fois la représentation terminée, on se rappelle à peine avoir entendu chanter Onéguine, au point qu'on se demande pourquoi le titre de l'oeuvre n'est pas Tatiana et Lenski. Il est vrai que c'est bien à cause d'Onéguine que meurt le poète Lenski (même s'il n'y a pas de duel dans la mise en scène) et c'est bien d'Onéguine que s'éprend la jeune Tatiana (mais, comme le faisait remarquer mon voisin, c'est à la manière de l'Adrienne Mesurat de Julien Green, avec participation nulle de l'objet de sa passion). Une méprise semble séparer les deux personnages principaux. Lenski poursuit l'insipide Olga ; une des rares paroles d'Onéguine dont on se souvienne est justement celle-ci : pourquoi, des deux soeurs, Lenski a-t-il choisi Olga et non Tatiana ? Tatiana et Lenski se succèdent sans se voir ; la mise en scène fait cependant se croiser les deux trajectoires, en confiant à Lenski les couplets que M. Triquet chante à Tatiana. La course de l'un finit à la mort, celle de l'autre dans une espèce de paradis aristocratique pétersbourgeois assez kitsch. (Tatiana l'emporte par la grande scène nocturne où elle écrit à Onéguine ; entraînée par son audace, échauffée par le souffle des cors, elle finit par monter sur la table, faire griller les ampoules et enfoncer les fenêtres... les grands monologues des héroïnes de Strauss donneront une version sophistiquée et sublimée de cet élan).

  • Les Capulet[s] et les Montaigu[s]

    Les Capulet et les Montaigu, de Bellini, à l'opéra Bastille.

    Roméo est chanté par une femme et ce travestissement a pour heureuse conséquence de nous débarrasser de l’indiscrète voix de ténor italien dans les scènes d’amour.

    (Mais les épées sont  tirées quand, dans le palais ouvert des Capulet, une musique funèbre vient interrompre la rencontre entre Roméo et son rival. Un chœur invisible soupire : Ahi sventurata ! Juliette est morte. Et c’est elle encore, cette plainte qui retentit dans les salles dévastées : telle que nous l’avons vue, dans les scènes antérieures, belle, éplorée et solitaire, parmi les hommes en armes.)

  • Le Prisonnier

    Le Prisonnier de Dallapiccola à l'opéra Garnier.

    "La torture par l'espérance" : le geôlier laisse un soir la porte de la cellule ouverte après avoir appelé "frère" l'homme qui y est enfermé. Le prisonnier toute la nuit erre dans la prison, cherchant la porte par où fuir. Il trouve au petit matin une ouverture, se croit sauvé, à l'air libre, mais, au lieu de la liberté, paraissent devant lui les instruments du supplice et le bourreau : il comprend que son évasion n'a été qu'un leurre, l'ultime torture inventée par les gardiens. (Si longue scène de torture, à l'opéra, je n'en connais pas d'autre que celle de Tosca ; plongés trois-quart d'heures durant dans les ténèbres de la prison bardées de grilles, on rêve de la trompette de Fidelio.)