Il n'est pas facile de décrire le principal élément de décor de cette production de Pelléas et Mélisande (photo d'ensemble, ici). Disons : une (demie) amphore géante, couchée sur le flanc, ouverte selon une coupe longitudinale. La chose tourne sur elle-même. D'un côté, on peut entrer dans la concavité avec une petite échelle et se tenir dans le ventre ou dans le col. De l'autre (la face convexe), un escalier et un balcon métalliques sont arrimés sur la panse ; l'échafaudage permet de grimper jusque sur le goulot d'où l'on peut, traversant le plan de coupe, se pencher sur la face ultérieure.
(Je ne sais pas si la composition est inspirée du sonnet Surgi de la coupe et du bond - auquel Maeterlinck emprunte peut-être sa "rose dans les ténèbres" - mais la matière en est charnelle et rouge et non d'une verrerie éphémère.)
Je ne me souviens pas de tous les usages et arrangements qu'autorise cette topographie complexe. Les personnages sont trop souvent rejetés sur les bords par l'encombrement et condamnés à tourner en rond autour de l'installation. Mais la scène de la tour, Mélisande perchée sur le col, Pelléas enfermé dans le vase, était très belle. Dans le dernier acte, Mélisande et Golaud sont tout deux installés dans la grande cavité : elle sur le bord, lui derrière. Golaud, se couchant, se relevant, est prisonnier d'un espace sans sol et sans perspective. Perdu dans la profondeur sans repère, il ne peut atteindre Mélisande qui lui tourne le dos (de même qu'il "ne saura jamais, qu'il va mourir ici sans savoir".)
Commentaires
Que les personnages "tournent en rond" (c'est un jugement de valeur ?) n'est en rien à mon avis un effet de l'oeuvre de Kapoor (qui permet que l'on passe dessous, que l'on monte à l'intérieur...), mais bien une volonté du metteur en scène ; aucun personnage ne quitte directement le plateau après chaque scène, il décrit un large cercle en observant le début de la scène suivante, ce qui rajoute de l'inquiétude et de l'angoisse à l'atmosphère, en particulier pour ce qui concerne Golaud qui est pratiquement toujours là à roder, et qui sais tout, tout de suite.
J'étais un peu loin de la scène... je n'ai pas bien compris (ce) qui (se) passait dans les ruelles...