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Noms de musiciens - Page 5

  • Liszt, Wagner

    Concert salle Pleyel.

    ("Le Ring sans paroles" : vrai, les coupures et coutures sont navrantes, tout pot-pourri est atroce et tout extrait symphonique amer. Mais ne nions pas le plaisir qu'il y a à feuilleter une fois encore le fameux livre d'images : la déplorable chevauchée des Walkyries ; leurs ricanements font penser aux vers de Hugo :
            Les chevaux de la mort se mettent à hennir
            Et sont joyeux
    Les adieux de Wotan ; on se dit que Mahler a dû les refaire quatre ou cinq fois. L'ascension par Siegfried du rocher de Brünnhilde, avec sa brève traversée de la merveilleuse musique du feu (combien extraordinaires apparaissent alors les progrès dans l'orchestration à mesure de la composition du Ring) ; puis le grain des cordes restitue la saveur astringente de l'atmosphère des cimes. L'idylle musicale de Siegfried et Brünnhilde : qu'elle est fugace ! à peine la chose vécue, c'en est déjà la remémoration. Le Rhin roule jusqu'à la cour bréhaigne des Gibichung. Le meurtre de Sigfried dans la clairière détrempée et lugubre. La marche funèbre ; vision renouvelée de celle de l'Eroica, rompue et comprimée, reconfigurée en rampe d'apothéose. Le finale ; mais sans l'immolation de Brünnhilde et les douze heures du drame antécédentes, on s'étonne : ce n'est que cela ?)

  • Schubert

    Winterreise, salle Gaveau.

    (Il y a, si on veut, deux Voyages d’hiver : l'un, celui du pauvre vagabond qui erre dans un pays glacé ; l'autre, celui du poète qui allégorise son désespoir amoureux. Chaque poème donne à voir une station et aussi une image de l’égarement du mal-aimé. Qui parle ? J’entends d’abord, ce soir, le poète dolent et témoin de sa douleur, dont la désolation n’exclut pas l’habileté. Cependant, à mesure que le parcours se déploie, les deux voix tendent à se confondre ; le marcheur voit danser devant ses yeux, dans une hallucination, la figure de son destin ; la métaphore développée par le poète coïncide avec la vision du voyageur. Dans le dernier lied, l’apparition est incontestable, il faut la suivre, le chanteur a fait un pas: c’est la mort.)

  • Bartok

    Au théâtre des Champs-Elysées, Musique pour cordes, percussions et célesta et le Château de Barbe-Bleue.

    (Le meilleur de la Musique pour cordes, etc. est dans son troisième mouvement : le silence est la cime. C’est un de ces nocturnes de Bartok caractéristique par son climat d’hyperesthésie : à la tombée de la nuit l’étendue sonore s’ouvre à des phénomènes que le jour assimilait au silence. Ainsi le tic-tac d’une horloge ou la goutte d’un robinet résonnent dans la maison endormie, et le glouglou des sources emplit le théâtre au début du deuxième acte de Tristan. Selon le temps ralenti, une faune inconnue déploie ses longs élytres. Le sol ou l’eau vibre doucement. Le chant innomé de l’oiseau xylophone a retenti. L’astre célesta rayonne.)

  • Schubert

    Die schöne Müllerin, salle Pleyel.

    (La voix se dégage peu à peu des battements du piano ou de la légère rumeur de la salle, prenant possession de l’espace. Le public d’un concert fait quelquefois penser à ces colonies d’animalcules dont on s’est longtemps demandé s’ils constituaient ou non un seul organisme : chacun vit de sa vie propre mais, d’un coup,  tous réagissent ensemble à la puissante stimulation extérieure. Le silence s’est fait. La substance assise et sensible, qui couvre tous les planchers de l’auditorium, s’agrège en une seule oreille pour cette parole seule.  L’extrême intimité du poème est dilatée à la mesure du volume extraordinaire. Et l’on sent, on entend et on voit, comme dans Thränenregen, tout l’univers se refléter dans le ruisseau, les nuages, les étoiles et le ciel, puis)

    Da gingen die Augen mir über,
    Da ward es im Spiegel so kraus;
    Sie sprach: Es kommt ein Regen,
    Ade, ich geh nach Haus.

  • Britten, Chostakovitch

    Salle Pleyel : Illuminations de Britten, Huitième de Chostakovitch.

    (Hormis celle-ci, je ne connais pas de mises en musique de Rimbaud et l’expérience ici est plutôt rebutante : d’autres poèmes, ceux du Cahier de Douai, iraient peut-être mieux mais la prose des Illuminations est particulièrement rétive.  A la lecture du texte, l’accompagnement de cordes sonne étriqué et douceâtre, et le propos paraît trivial ; ou bien les phrases font bloc et la musique n’y entre pas).

  • Brahms, Bruckner, Stravinski.

    Salle Pleyel : messe n°2 de Bruckner, Symphonie de psaumes de Stravinski.

    (Dans le finale de la symphonie, ne dirait-on pas que Stravinski adapte à la musique le procédé du ralenti cinématographique : les saccades du temps sont brutalement dilatées, on croirait là voir courir le cent mètres à grandes enjambées suspendues ou bien de lourds chevaux au galop défiant les lois de la pesanteur, posant délicatement leur sabot sur le sol qui vibre comme la peau des timbales)

  • Schumann, Liszt

    Salle Pleyel : concerto pour violon de Schumann, symphonie "Faust" de Liszt.

    (Dans le concerto, je préfère les passages lents, le moment intermédiaire du premier mouvement ou le mouvement central : l'instrument soliste se fond alors dans la sonorité générale, il ajoute à la masse un peu grise de l'orchestre son accent lumineux, courant à la surface de l'étendue sonore et concentrant la clarté dissoute. Les passages animés paraissent viser trop court, impuissants à l'héroïsme ou la jubilation : et puis le premier thème du finale me rappelle une phrase d'un lied de Mendelssohn mais il y manque la fin, si bien que j'ai l'impression d'un danseur qui commence mais ne finit pas une figure, oubliant de retomber sur ses pieds.)