Au Théâtre des Champs-Elysées.
(Il y a la bande-annonce vers la fin du troisième mouvement. Puis le chef fait baisser les lumières, pousse les graves, ouvre les vannes et lance le film-finale... avec musique d'accompagnement.)
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Au Théâtre des Champs-Elysées.
(Il y a la bande-annonce vers la fin du troisième mouvement. Puis le chef fait baisser les lumières, pousse les graves, ouvre les vannes et lance le film-finale... avec musique d'accompagnement.)
Salle Cortot.
(Quatuor Danel - Quatuor à cordes n°1, 8 et 15).
(Le Quinzième Quatuor) doit être joué de telle façon que les mouches tombent raides mortes du plafond et que, par pur ennui, le public se lève et quitte la salle.
... disait, paraît-il, le compositeur. L'expérience, hier soir, n'a pas été entièrement concluante. Le premier mouvement est cependant bien lent, presque immobile. Les quatre voix chantent pauvrement à voix basse le même thème. Si elles n'étaient interrompues, leur patience en viendrait à bout et finirait par dissoudre entièrement la musique dans la durée, ne laissant subsister autre chose dans le temps que le grain de l'archet contre la corde et l'inspiration des musiciens qui reprennent leur souffle.
Au Théâtre des Champs-Elysées.
Les deux oeuvres jouées, la Suite sur des poèmes de Michel-Ange et la Quinzième Symphonie font partie des dernières composées par Chostakovitch ; elles diffèrent plus par leur ton que par leur musique. La première porte une parole et fait figure de testament ; la seconde, sans mots, reste sans commentaire.
Dans la Suite, la voix est sombre, étouffée mais son chant plein d'aplomb. L'homme de génie est orgueilleux et amer, ennemi de son temps et sûr de son art. Michel-Ange parle russe ; malgré le livret, je ne peux pas suivre. Cependant la paraphrase du vers (où Michel-Ange donne la parole à sa Nuit du tombeau des Médicis) :
Caro m'è 'l sonno, e più l'esser di sasso
s'accompagne, je crois, d'une citation de la Quatorzième Symphonie : il s'agit du passage qui met en musique la Mort du poète, de Rilke - derrière ces mots-ci, ceux-là. La Nuit, le sculpteur, le poète et Chostakovitch : que d'alter ego convoqués dans l'ombre !
La Suite débute par une fanfare qui sera répétée plus loin. Fanfare de marbre, solennelle et nue, elle confond les trompettes d'un Jugement dernier et celles embouchées par la Renommée. Elle sonne la gloire et ouvre à la Vie éternelle.
La dernière pièce, par contraste, agrémente l'immortalité d'un air guilleret et carillonnant. La Quinzième Symphonie commence par un air semblable et presque railleur confié aux flûtes. Elle se conclut dans une même allégresse énigmatique frappée par les percussions. Entre-temps on a entendu des collages de musiques de Rossini (comme dans Jeu de cartes de Stravinski) et de Wagner qui donne aux autres épisodes des apparences de pastiche ou de parodie.
Aux Bouffes du Nord.
Premier Quatuor à cordes de Brahms. C'est peut-être la première fois que je l'entends. Je crois pourtant reconnaître le troisième mouvement (est-ce possible ?). Le reste du temps, je suis distrait par le ronflement des projecteurs. Un cinquième protagoniste, indésirable, se mêle aux quatre musiciens. Il est perché contre la rampe du balcon ou en haut des murs. Il siffle continûment, sans perdre haleine, se faisant entendre dès que les autres baissent la voix.
En seconde partie, le Quintette pour clarinette et cordes. C'est là ce que Brahms a composé de meilleur, je crois. La clarinette est mise au centre. Elle prend des poses de charmeur de serpents, se tournant vers le premier violon ou le violoncelle. Mais, loin de diriger leurs évolutions, elle les accompagne ou cherche à s'en faire accepter. Elle ne peut rivaliser avec leur mobilité, avec la sinuosité de leurs parcours. Elle ajoute une ombre heureuse à leur jubilation tranquille.
Au Théâtre des Champs-Elysées.
Quand commence le dernier mouvement de la Neuvième, il reste quatre sièges vides au premier rang du choeur, derrière l'orchestre. Cependant, au moment marqué, un homme entre sur scène, s'arrête et se tourne vers nous ; il passait dans les coulisses, quelque chose le force à intervenir et à prendre la parole : assez de suggestions abstraites ! cette musique grave et magnifique ne suffit plus ! chantons ensemble ! cet air que fredonnaient les violoncelles tout à l'heure, entonnons-le ! nous sommes conviés à une fête et il n'y a pas de fête sans voix ! (A son signal, le choeur se lève ; trois compères surgissent, le rejoignent et complètent le quatuor ; tous chantent, ensemble et à leur tour, jusqu'à la fin).
Au Châtelet.
Après le concerto de Schumann (qui me donne toujours l'impression de ne pas arriver à finir ses phrases), la Neuvième de Mahler. Elle commence lentement comme un appareillage dans la brume (avec sa corne enrouée) ; quelque chose d'énorme et d'encore nonchalant démarre et roule sous le battement des eaux (les harpes, le gong... Les contrebasses rament...). Un beau voyage. Cependant la flânerie, l'agile liberté, le soleil, sont noyés par le retour de cette hésitation initiale qui s'obscurcit par degrés, brutaux plongeons successifs plus avant dans l'ombre :
Et l'eau froide est de plus en plus noire
Et plus pure la mort, plus âcre le malheur
Jusqu'à ce qu'en effet la mort se dresse (Alban Berg dixit) toute cuirassée de fer (et bardée de cuivres). Mais l'excursion reprend.
Autre alternance dans le finale : un bourdon farouche de cent mouches de bois et de cordes chante à tue-tête l'air de la nostalgie ; s'interrompt pour que naissent de son abstention les fragiles effloraisons du temps suspendu ; reprend sa chanson « vaine déploration de l'écoulement sans retour de la vie humaine ». Bien après les voix se calment, se raréfient (se recueillent pour écouter la phrase du violoncelle) ; il n'en reste pour finir que les articulations tracées dans l'air (que ce soient la battue du chef ou les ultimes coups d'archet des altos), une présence tue, musicienne du silence.
A Pleyel.
Un concert dominé par l'interprétation de la Cinquième Symphonie de Chostakovitch, après l'entracte. Lentes ou brutales, les grandes figures d'héroïsme ou de triomphe y apparaissent absolument dépourvues d'enthousiasme, stériles, nues et mécaniques, mises à distance. S'en détourne une voix très naïve, dans le largo, un célesta (comme l'Idiot à la fin de Boris Godounov ?)