La ville est bâtie au pied de la montagne ; et les neiges du Mulhacén sont au-dessus d'elle comme le signe de la nuit d'hiver suspendu tout le jour parmi les avant-coureurs du printemps (Les eaux de fonte ruissellent dans la ville, la lumière détaille le grain de la terre nue et les anfractuosités, dénombre les fleurs blanches dans les arbres sans feuilles).
Mes bouquins refermés - Page 56
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Grenade
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Beethoven
Salle Pleyel.
(Étrange interprétation de la Quatrième et de la Septième : dans les derniers mouvements de celle-ci, j'avais l'impression d'entendre une toute autre musique, quelque chose de Stravinski (est-ce possible ?), à la fois luxueux (les belles sonorités droites et sans mélange des vents) et brutal (les coups secs et envahissants des timbales), une musique à froid.)
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Politesses posthumes
On ne s'étonnerait peut-être pas de lire en épigraphe des Poésies de Machado (dans l'édition Poésie/Gallimard) une Oraison pour Antonio Machado signée Rubén Darío, au ton funèbre et conjuguée à l'imparfait, si on ne trouvait plus loin, dans le texte lui-même, un poème intitulé A la mort de Rubén Darío.
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Le Chevalier à la rose
Au Théâtre des Champs-Elysées.
Version de concert : l’orchestre sur scène, aussi beau soit-il, submerge les chanteurs ; leurs entrées et sorties sont inaperçues ou secondaires ; on ne voit plus, selon l’action, le plateau se vider ou se remplir (c’est pourtant un ressort majeur du livret) ; la scène, surpeuplée, reste plus encombrée que l'antichambre du premier acte. Est-ce pour cela que les si beaux monologues de la Maréchale perdent en importance ? Son personnage semble rejeté aux marges ; pour une fois, on l’oublie dès le début du deuxième acte et son retour au finale semble dispensable après que Sophie et Octavian se sont si bien accordés : que vient-elle faire là ? (Le fameux trio qui les rassemble alors n’est pas sublime de bout en bout ; le point culminant s’accompagne des ululements disgracieux).
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Madame Butterfly
A l'Opéra Bastille.
(Au deuxième acte, coup de théâtre : sans avoir été annoncé paraît sur scène l'enfant déjà grand de Butterfly et Pinkerton. La femme séduite et abandonnée se renouvelle en mère sacrifiée. Après la floraison, et puis ce long mûrissement alimenté par le lourd ferment de la musique, elle meurt en expulsant son fruit, la saison et terrain sont favorables.)
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Pierres
C'était l'époque, et le phénomène était universel, où des pierres apparaissaient par condensation ; elles naissaient d'une substance répandue dans l'air. On pouvait trouver le matin, dans des chambres fermées, un sable grossier semé sur les meubles et les tapis. J'ai ramassé un peu de ce gravier et le tiens dans la paume : sa couleur va du blanc au rose pâle ; les grains sont friables et le plus souvent irréguliers ; quelques-uns cependant s'allongent et forment des bâtonnets qui font penser à des fragments de corail. J'ai dans la main un exemplaire particulièrement bien venu : ses cinq branches s'arrangent en étoile et sont reliées par des barreaux qui dessinent un pentagone à peu près régulier (comme l'image excessivement grossie d'un flocon de neige).
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La neige
A gauche, la mer. Des crêtes, perpendiculaire au rivage, déterminent une succession de pointes et d'anses où la ville est installée. L'horizon est fermé par une presqu'île rocheuse et nue. Les édifices majeurs sont bâtis sur les positions les plus élevées ; ils ont des formes simples, rondes ou carrées, à peu près sans ouvertures. Les autres constructions, situées plus bas, leur sont proportionnées. Cette mesure désigne, sans doute, la partie ancienne de la ville car elle se perd quand on s'éloigne du rivage, qui n'est peut-être lui-même qu'un décor : la ville s'ouvre et grandit en lui tournant le dos. L'influence de la mer cesse et le sol se couvre de neige ; les couleurs, qui étaient comme peintes, s'étiolent.