Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Musique et théâtre - Page 15

  • Platée (2)

    A l'Opéra Garnier.

    Platée, nymphe crapaud, est mystifiée par Jupiter qui feint de vouloir l'épouser. Malgré le travesti, le rôle ne pousse pas « le dépit amoureux jusqu'à la métaphysique, l'amour monstre ou transgenre ». Non, à la fin de l'opéra, le sentiment qui commande la colère de la dupe est la vanité blessée, ce qui achève de la rendre ridicule.

    Retenons que pour le peuple des grenouilles et sa souveraine le son « oi » se prononce « ô-a ». Que la Folie chante ses paroles à contresens de la musique ; et conduit une suite de danses détraquées. Qu'un air appelle la pluie et on entend, pizzicati, les premières gouttes de l'averse.

  • Siegfried (2)

    Au Châtelet.

    (Siegfried a reforgé l'épée magique ; il a tué le dragon, il s'est emparé du magot. Il ressort de la caverne avec l'anneau prodigieux et le heaume enchanté. Mais l'anneau du Nibelung a beau promettre le pouvoir et apporter la mort à ceux qui s'en emparent, il passe inaperçu sur une scène d'opéra (malgré les efforts du metteur en scène qui l'a surmonté d'un gros cabochon cubique). C'est donc un accessoire dont on parle mais qui ne sert pas – contrairement aux deux autres. Je crois néanmoins me souvenir qu'il en sera fait un usage dramatique un peu plus soutenu dans l'épisode suivant...).

  • La Walkyrie (2)

    Au Châtelet.

    (Siegmund entonne : Winterstürme wichen dem Wonnemond... L'air contraste par son style avec le reste du drame ; il donne l'impression d'être détachable. On se dit qu'il pourrait être chanté isolément, par un ténor, dans un récital. En cela il appartiendrait à un genre d'opéra plus ancien, à une étape antérieure de l'écriture de Wagner. Flotte alors un léger parfum de ringardise qui fait penser au On dirait que ta voix a passé sur la mer de Pelléas – où il est également question du printemps, faut-il incriminer la saison ?)

  • L'Or du Rhin (2)

    Au Châtelet.

    Convaincu que la musique est l'art de la répétition, je commence une nouvelle Tétralogie, la même. Est-ce parce que j'ai changé de place et que je me suis rapproché de la scène, latéralement ? j'ai l'impression que les voix sont plus présentes, plus grandes, et que l'orchestre a rapetissé en proportion. Elles bénéficient peut-être de la remémoration des épisodes futurs (elles sont grosses de leur avenir déjà advenu). J'entends les personnages qui reviendront dans les opéras suivants avec le souvenir de leur performance ultérieure (ceci renforcé par le fait que les interprètes n'ont pas changé). Fricka est si belle, si humaine qu'on guette avec impatience chacune de ses interventions (fâchée, compatissante, jalouse, radoucie).  Alberich profère la malédiction ; c'est une nuée sombre qui l'entourera encore quand il viendra hanter bien plus tard son fils Hagen. Erda s'avance et prophétise le Crépuscule des Dieux (on frissonne). Loge figure le cas peu ordinaire d'un homme qui va se métamorphoser en musique seule (à rebours de l'oiseau qui prend la parole dans Siegfried). Dans le finale, les lamentations des filles du Rhin et les sarcasmes de Loge commentent l'entrée un peu creuse des dieux au Walhalla ; comme l'eau et le feu qui l'anéantiront dans quelques jours.

  • Les Noces de Figaro

    A l'opéra Garnier.

    (En haut de la scène il y a une espèce de grenier, qui ne communique pas avec le seul décor où se déroule l'action. Personne ne s'y promène sauf le « récitativiste » (ce n'est pas un personnage de l'opéra, ce n'est pas un musicien, ce n'est pas un figurant) qui y vient de temps à autre en montant par les coulisses. Dans le grenier il y a des peluches ou des animaux empaillés (daims, moutons, lapins, etc.). Rien ne bouge sauf à la fin. Après le pardon chanté par la Comtesse et le oui général, dans la frénésie qui suit, le récitativiste arrange entre les bêtes un ou deux accouplements).

  • Don Giovanni

    A l'Opéra Garnier.

    (Plongé dans la pénombre, entrecoupé de silences.)

    Le finale du premier acte : une fausse fête, brutale, ratée. Personne ne danse à la musique (dans la musique) qui sonne faux, à l'écart.
    Pour la convaincre, Don Giovanni parle à Zerlina de mariage ; mais dans son récitatif, il fait précéder ironiquement ses sposar d'une pause très brève (en détachant le mot comme s'il était entre guillemets).
    Compris comme jamais la séduction du personnage (sa voix, son chant, son jeu). Le paradoxe est que malgré tout cela, à aucun moment, ni alors ni plus loin dans le cours de l'opéra, le séducteur ne parvient à ses fins (il n'y a guère que Leporello qui lui cède toujours). Prenant appui sur ce décalage, la mise en scène nous le montre démoniaque et suicidaire dans l'air du Champagne, et solitaire dans la Sérénade –  chantée pour lui-même, prostré dans l'ombre, sur la scène déserte.

  • Le Crépuscule des Dieux

    Au Châtelet.

    La plus longue, la plus belle, la plus désespérée des journées de l'Anneau du Nibelung : comme des sommets successifs, l'opéra culmine dans les deux blocs contraires des actes 2 et 3 (et derniers) ; l'acte 3 dans le monologue final de Brünnhilde ; et celui-ci dans l'appel funèbre : Ruhe, ruhe du Gott.

    (La dissimulation et la trahison règnent - thèmes du Tarnhelm et du philtre que je confonds.
    L'humanité tout entière en est le témoin ignorant et passif - les choeurs des deux derniers actes.
    Et malgré la Nature et l'Amour remémorés - dans le si beau chant final de Siegfried reparaissent les murmures de la forêt, l'oiseau, le réveil de Brünnhilde,
    le seul triomphe est dans la mort - marche funèbre, immolation, apocalypse par le feu/Loge et l'eau du Rhin.)