Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Mes bouquins refermés - Page 47

  • Oiseaux encagés

    Miss Flite est très assidue à son procès. Il dure depuis des lustres, embrassant plusieurs générations de plaideurs. Mais la vieille dame ne   manque pas une seule séance de la cour et attend fermement "le jour du jugement". Ce jour-là, dit-elle, la verra octroyer des établissements et libérer ses oiseaux. Elle les garde dans sa chambre derrière un rideau, dans l'embrasure d'un chien-assis :

    She partly drew aside the curtain of the long, low garret window and called our attention to a number of bird-cages hanging there, some containing several birds.  There were larks, linnets, and goldfinches--I should think at least twenty.

    "I began to keep the little creatures," she said, "with an object that the wards will readily comprehend.  With the intention of restoring them to liberty.  When my judgment should be given.  Ye-es!  They die in prison, though.  Their lives, poor silly things, are so short in comparison with Chancery proceedings that, one by one, the whole collection has died over and over again.

    Elle ne dit pas le nom des oiseaux. Pourtant chacun a le sien ; un jour Krook, son logeur, le révèle à ses invités.

    "It's one of her strange ways that she'll never tell the names of these birds if she can help it, though she named 'em all."  This was in a whisper.  "Shall I run 'em over, Flite?" he asked aloud, winking at us and pointing at her as she turned away, affecting to sweep the grate.

    "If you like," she answered hurriedly.

    The old man, looking up at the cages after another look at us, went through the list.

    "Hope, Joy, Youth, Peace, Rest, Life, Dust, Ashes, Waste, Want, Ruin, Despair, Madness, Death, Cunning, Folly, Words, Wigs, Rags, Sheepskin, Plunder, Precedent, Jargon, Gammon, and Spinach.  That's the whole collection," said the old man, "all cooped up together, by my noble and learned brother."

    (Dickens - Bleak House)

     

     

     

  • What Maisie knew

    (Entretien extraordinaire, et sans doute le dernier, entre la jeune Maisie et son père :)

    (...) but if he had an idea at the back of his head she had also one in a recess as deep, and for a time, while they sat together, there was an extraordinary mute passage between her vision of this vision of his, his vision of her vision, and her vision of his vision of her vision. What there was no effective record of indeed was the small strange pathos on the child's part of an innocence so saturated with knowledge and so directed to diplomacy.

    (James - What Maisie knew).

  • Madeleine

    L’enterrement du Christ, de Titien.

    (Dans le ciel inachevé, les mains de Madeleine apparaissent une seconde fois, par l’effet d’un repentir, au-delà des bras ouverts, augmentant leur écart. On a l’impression d’un corps brutalement arrêté, comme une flèche plantée dans la cible, qui vibre encore. Le point d’arrêt de la figure dressée sur les pointes, c’est ce cadavre puissamment lourd et immobile sur qui elle se penche. Tous les efforts réunis peinent à soutenir son poids ; seuls lui conviennent l’ensevelissement et la pierre historiée du tombeau. Madeleine arrive trop tard, pas même épousée et déjà veuve ; sa poitrine est flétrie, sa robe blanche est le linceul.)

  • Molé

    Le portrait par Ingres du comte Molé est enfin entré au Louvre. Il est exposé dans les salles, aux murs rouges, des grands formats du dix-neuvième siècle français.

    (La pointe du col de chemise fait un point brillant juste sous l'oreille gauche et ajoute comme un anneau de pirate à son air farouche).

  • Vincere

    Vincere, de Bellochio.

    (Ce qui m'a gêné : que ce film, dont l'enjeu est une lutte pour maintenir la vérité, prenne la forme d'une fantasmagorie.)

  • Wagner, Schumann, Tchaïkovski

    Concert au Théâtre des Champs-Elysées.

    (Une fanfare omineuse, qu’on a l’impression d’avoir entendue ensuite bien des fois chez Mahler, ouvre le premier mouvement de la Quatrième de Tchaïkovski. Elle me fait penser à cette scène de Mulholland drive où le réalisateur est convoqué en pleine nuit par un improbable cow-boy. Après lui avoir signifié ses instructions, le cow-boy lance pour finir une espèce d’avertissement sinistre : "Now you will see me one more time, if you do good. You will see me two more times, if you do bad." Dans le dernier mouvement, la fanfare se fait entendre à nouveau, abruptement, comme une tête de mort tombée sur l'étal d'un confiseur.)

  • L'aveugle

    L’autre jour, au Louvre, j’ai croisé un aveugle en train de visiter l’exposition Titien, Véronèse, Tintoret. L’homme qui l’accompagnait le menait d’une salle à l’autre ; lisait les cartels et lui décrivait sommairement les tableaux, parlant par le truchement d’un petit microphone relié à un casque.