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  • Les promesses de l'ombre, de Cronenberg

    Nikolaï n'est au début que le "chauffeur" ou le "croque-mort" de l'organisation ; il finira par prendre la tête de du gang. Mais son dessein est plus vaste encore. Il est aussi un agent double travaillant à intégrer cette branche particulière de la maffia russe. Il est d'abord adoubé par le directoire de la chevalerie du crime (mais la cérémonie, sans être une imposture, est un piège), on le marque d'un tatouage spécial ; également nu, il est initié une seconde fois (selon un ordre supérieur) lors d'un combat inégal dans les entrailles d'un bain de vapeur (le surin remplace le poinçon du tatoueur). Vainqueur, la figure du héros ne cesse de grandir ; il vide de sens les codes grotesques du clan, il l'emporte sur les personnages ou les acteurs concurrents (le fils indigne, la sage-femme et mère). Il finit seul, sous le déguisement d'un parrain de la maffia, sans qu'on comprenne à quelle suprême manoeuvre il travaille.

  • A nouveau Ornans

    Exposition Courbet, au Grand Palais.

    La quantité d'oeuvres est impressionnante, célèbres ou seulement splendides  : de l'autoportrait à la pipe jusqu'aux natures mortes aux pommes, dans l'ultime salle.  Même les grandes toiles du musée d'Orsay (privé ainsi de son principal chef-d'oeuvre) ont été transportées là : l'Atelier et un Enterrement à Ornans. Elles y sont davantage éclairées : ce qui favorise la première (un intérieur) et désavantage plutôt la seconde.

    Il y a également, de Lille, l'Après-dîner à Ornans (y a-t-il meilleure peinture de la musique ou du sommeil ?). Plus loin, les Sources de la Loue y font à nouveau penser : le grand clavier des blocs clairs à la voûte et dessous la confusion de l'ombre et de l'eau.

    La touche des paysages (la matière des roches ou de la végétation) est diffuse, non tracée, comme un coup d'éponge sur une toile cirée : la superposition des feuillages ainsi représentés est particulièrement belle dans le Ruisseau du Puits-Noir, rendant la profondeur et le demi-jour du sous-bois, le brouillard d'après-midi tiède et vert.

  • Schubert

    Le Voyage d'hiver, au Théâtre des Champs-Elysées.

    Ce qui frappe ici, c'est la jeunesse du voyageur (cheveux noirs, que le givre ne fait que couvrir), la simplicité de ses colères (toujours près de jaillir et dont pourtant l'objet se perd peu à peu) ; elles marquent presque de bravade "Mut" et la fin de "der Wegweiser":
            Eine strasse muss ich gehen
            die noch keiner ging zurück

    Il a une façon encore enfantine de prendre à partie les êtres et les choses, de plain pied avec un monde de rêveries et de contes ; ainsi quand, dans "Frühlingstraum", des fleurs de givre sur la vitre le fascinent :
             Ihr lacht wohl über den Traümer,
             Der Blumen in Winter sah ?

    ou quand il interpelle un corbeau dans "die Krähe" :
             Krähe, wunderliches Tier,
             willst du mich nicht verlassen ?
             Meinst wohl, bald als Beute hier
             meinen Leib zu fassen ?

     

  • Sibelius

    Salle Pleyel.

    Au programme, les deux plus belles symphonies de Sibelius, la quatrième  et la septième. La quatrième se dérobe ; elle gagne à être entendue en concert : l’œil soutient l’oreille. Le premier mouvement commence de façon extraordinaire par un glas des cordes graves et puis la longue entrée du violoncelle seul. Comme dans l’ouverture de Parsifal, le troisième mouvement fait entendre une même phrase incachevée, en suspens, qui se répète, se rassemble et se complète avant de percer et trouver sa conclusion et puis de se dissoudre.
    La septième est plus aimable : c’est d’abord un somptueux sentiment d’envol, avec l'accroissement progressif des cordes. L’ascension débouche sur une impression de panorama illimité (espace grand ouvert des cuivres déployés). Après un épisode plus rapide, les cuivres entrent à nouveau : une tempête souffle en plein ciel.

  • Souvenirs de Flaubert

    Je croyais qu' un Enterrement à Ornans (1850) de Courbet figurait l’enterrement de l’héroïne de Madame Bovary (1857). C’est au-dessus d’Yonville, dans la campagne délavée, sous les falaises de craie. Devant la fosse se tient Charles, tête nue, échevelé et blafard, n’écoutant et ne voyant personne. A gauche, un Rodolphe plébéien (qu’il a fière allure !) a mis un genou à terre. A droite Homais, bras levé, pérore. A l’écart, les femmes « couvertes de mantes noires à capuchon rabattu », offusquées par de grands mouchoirs. Leur cortège s’est replié sur lui-même, le chagrin forme la ronde. J’étais étonné de les voir pleurer autant une femme qu’elles ne devaient pas porter dans leur cœur.
    (Mais, à dire vrai, on peut mettre un nom sur presque tous ces visages ;  ce sont les portraits, réels et non fictifs, d’habitants du village d’Ornans, d’amis ou de parents du peintre. Dans l’invention de l’artiste, on ne sait pas qui est porté en terre.)

  • Sibelius

    Salle Pleyel

    Pas séduit par le romantisme sucré des sept lieder avec orchestre.
    Déçu par l’interprétation de la sixième symphonie (Un jeu trop contrasté nuisait peut-être au foisonnement étale de cette espèce de Pastorale nordique, aux couleurs claires, aux éclats de la lumière nature.)

    Le plus réussi était sans doute ce que j’aime le moins : le finale de la cinquième symphonie. D’un coup l’orchestre semble former un bloc unique ; une même transe saisit tous les musiciens les subordonnant aux mouvements d’un seul. Le thème vedette a la grâce d’une sonnerie d’alarme géante… mais il est joué ici très lentement et tourne lentement et rayonne.

  • Retour de Lyon

    L'automne, confluent :

    Le quai de la Saône, bien situé, environné de collines et d'édifices à physionomie, représente l'été à Lyon ; pour le quai du Rhône, c'est l'insignifiance moderne et l'hiver.
    (Stendhal, Mémoires d'un touriste).