Donne-moi tes yeux, de Guitry.
Paris 1943. Au Palais de Tokyo, une exposition d'art français moderne. Guitry, alias François Bressolles, sculpteur, nous fais visiter une salle particulière : y sont réunies des toiles de Manet, Corot, Cézanne, Monet... toutes de 1871. Au moment même où le pays est vaincu, son art triomphe. La défaite ne compromet pas cette autre victoire, essentielle. Que ce soit le cas aujourd'hui encore, nous l'allons montrer tout à l'heure. (Réjouissante familiarité de Guitry, non seulement avec les peintres contemporains, filmés sans façons lors d'un vernissage, mais avec les artistes français du dix-neuvième siècle et au-delà, dont les oeuvres décorent son appartement ; comme cette Main de Rodin qu'il prend dans la sienne.)
François fait la connaissance d'une jeune femme, Catherine, qui accepte de poser pour lui ("je vais vous faire en glaise"). Coup de foudre réciproque. Malgré les trente ans qui les séparent, ils vont se marier. Mais, dans le délai qu'il a imposé avant qu'elle donne sa réponse, François découvre qu'il est en train de perdre la vue. Il cache la vérité à Catherine et feint de la repousser. Comme Paris, François est plongé dans les ténèbres (admirable scène où les deux amants marchent à travers la ville sans lumières, dans le cercle d'une lampe de poche, ayant raté le dernier métro.) Mais sa muse finir par voir clair dans son jeu, elle vient le retrouver et accepte l'épreuve.
(Paris au temps du marché noir. Une chanteuse de cabaret se voit proposer un cochon entier en échange de ses faveurs. "Dites à ce cochon que je ne veux pas de son porc, ou à ce porc que je ne veux pas de son cochon.")