Un jour une barque aborde dans le port de la petite ville de Riva. En sort un brancard porté par les mariniers où une forme humaine est étendue, sous une couverture à fleurs. Ils traversent la place et entrent dans une des maisons du bord de l'eau. Seuls les enfants et les pigeons semblent marquer un peu d'intérêt à ce cortège.
Mais bientôt arrive un individu coiffé d'un haut-de-forme avec un crêpe. Il frappe à la porte, on le fait monter jusqu'à la pièce où le corps repose entre des cierges, comme pour une veillée mortuaire. Mais l'homme couché là, avec sa barbe et ses cheveux en désordre, n'est pas mort ; il n'est pas vivant non plus. Comme il l'explique à son interlocuteur, qui est le maire de Riva : un jour qu'il pourchassait un chamois dans la Forêt Noire, il s'est tué en tombant d'un rocher. Mais, pour une raison ou une autre, le processus mortel s'est interrompu et depuis, le chasseur navigue sur les eaux terrestres.
Max Brod qui a composé le texte que nous lisons à partir de différents fragments laissés par Kafka, place alors ces mots dans la bouche du chasseur Gracchus :
- Personne ne lira ce que j'écris, personne ne viendra à mon aide. Si on faisait un devoir de me venir en aide, les portes de toutes les maisons resteraient fermées, toutes les fenêtres fermées ; tous garderaient le lit, la tête sous les couvertures : le monde entier comme une auberge la nuit. Ce n'est pas sans raison (....) L'idée de me venir en aide est une maladie et doit être soignée au lit.
Le maire s'inquiète : « comptez-vous maintenant rester avec nous à Riva ? »
(Variation très personnelle sur le thème du Hollandais Volant).