"Carte blanche à Henri Dutilleux" : c’est le musicien qui a choisi le programme ; il est assis au parterre et vient saluer à la fin, entraînés par les deux compositeurs présents. C’est lui également qui a insisté pour que la pièce de Betsy Jolas soit donnée deux fois. "Car les ouvrages de notre temps sont très désavantagés par rapport à ceux du répertoire et, dans leur cas, il est bien rare que le public ait dans l’oreille ce qu’il va entendre". Entre les deux exécutions, Betsy Jolas vient remercier le maître et présenter le morceau redoublé. L’air de concert est tiré son opéra Schliemann. La suite (dont il constitue également un extrait) n’a pas servi à de prospectus à l’opéra avant sa création, comme c’est la coutume, mais elle permet a posteriori d’en faire entendre à nouveau la musique (thème obsédant de la soirée). On y reconnaît deux leitmotive (non, pas davantage) : le bruit du vapeur et le motif d’Hélène (la musicienne trace en l’air une espèce de chapiteau de cirque : mouvements, ascendant et descendant, en deux sections disjointes). Il y a encore quelque chose du Farben de l’opus 16 de Schönberg. Le livret vient d’une pièce de théâtre. L’auteur y a trouvé toutes les figures qui "font" le genre : air des bijoux , duo d’amour et ensemble mozartien. La scène est au large de l’Asie mineure, sur le pont du navire. Il fait nuit. L’épouse grecque de l’archéologue chante alors que celui-ci s’endort la tête sur ses genoux. A côté d’eux, une grosse caisse (non j’ai lu le programme trop vite : il s’agit d’une grande caisse) contient les bijoux mis au jour dans les ruines de Troie.
(La musique est belle mais il manque quelque chose qui marquerait la mémoire ; ni le personnage ni le texte ne font forte impression et ne retiennent la fugitive. Il est en revanche difficile d’oublier Lontano, donné en ouverture, quand on l’a entendu une fois.)