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  • Slow man, de Coetzee (2)

    J'ai eu plus que le temps de finir Slow man, ce matin dans le bus. Alors ? rien à ajouter.

  • "They were all of them fond of quotations"

    J'ai vu les deux globes suspendus dans la nef rénovée du Grand Palais. L'un la terre, l'autre la voûte étoilée projetée sur une sphère. Aux lignes tirées parmi les constellations répondaient les nervures du dôme de verre tracées en plein ciel.

    Que veut dire cette image ? Je ne sais pas : elle finit (comme les poutrelles de fer portent le pinacle, la hampe et le drapeau) par un quatrain de la Chasse au Snark (relu à propos d'un ramequin) :

    "What's the good of Mercator's North Poles and Equators,
         Tropics, Zones, and Meridian Lines ?"
    So the Bellman would cry: and the crew would reply
         "They are merely conventional signs !"

  • Slow man, de Coetzee

    (Aussitôt dit, aussitôt fait. Je ne suis encore qu'au milieu de ma lecture du nouveau roman de Coetzee. Il n'est pas bien épais. Demain ou après-demain, sauf imprévu, j'aurai fini. Je saurai si ça m'a plu. J'en dirai peut-être alors à nouveau quelque chose. Mais la manie du dédoublement qui possède l'auteur est contagieuse. Alors un personnage fugace prend la parole, ce lecteur que j'ai de bonnes chances de ne plus être dans quelques jours, qui n'a lu que la moitié du dernier Coetzee).

    Un homme, Paul Rayment, est victime d'un accident de la circulation. Dans les moments de semi-lucidité qui suivent, sur un lit d'hôpital, s'insinuent comme une pointe les paroles du médecin : il va falloir amputer la jambe blessée. Paul est maintenant un infirme ; il prend conscience avec désespoir de sa nouvelle condition d'homme diminué, déjà vieux, seul, sans descendance, traité de façon humiliante par la société, etc. Va-t-il reprendre goût à la vie ? Une nouvelle infirmière vient s'occuper de lui, une mère de famille croate (tiens ! comme l'héroïne du chef-d’œuvre de Roth, Sabbath's Theater). Paul commence à s'intéresser à la belle et solide Marijana et à ses enfants.

    Tel est le début du roman (qui vaut mieux que ce résumé) sérieusement mené et développé jusqu'ici sans trop de surprise. Je n'en tire aucun jugement hâtif : le début de Disgrace également était convenu ; l'histoire d'un professeur d'université qui couche avec une de ses étudiantes donnait une impression de déjà lu, avant que le livre ne prenne une toute autre ampleur. Dans ces premières pages, je retrouve l'art de Coetzee : la prédilection pour les autoportraits cruels non dépourvus de dérision, qu'il partage avec Kafka. Je songe à la Métamorphose (le héros de Disgrace faisait penser à Joséphine la cantatrice). Je suis pris par l'alliance entre l'allégorie et un réalisme chevillé au corps (et à ses misères) ; j'apprécie les allusions à l'art (la Photographie), l'interrogation sur l'histoire, les racines, ce que veut dire recommencer sa vie, ailleurs ou tardivement. Mais la question reste ouverte : où cela va-t-il nous mener ?

    Surprise ! un nouveau personnage vient alors sonner à la porte de Paul. Elizabeth Costello, herself, fameux écrivain australien, doppelgänger féminin et très fatigué de Coetzee, héroïne progressivement aphasique de son précédent roman. Il l'avait laissée (dans mon souvenir) perdue dans les limbes d'une station balnéaire d'Autriche-Hongrie, ni vivante ni morte (avatar du Chasseur Gracchus) pendue parmi les fantômes des créations de Kafka et de Hofmannsthal.

    J'en suis là : j'ai peur que le livre se perde dans la gratuité d'un jeu littéraire mais je ne désespère pas. A suivre.

  • Deux images

    Deux images du Poète et l'époque présente de Hofmannsthal (Poésie / Gallimard - trad. Albert Kohn) :

    Le maître au retour d'une très longue absence se voit imposer l'épreuve d'entrer chez lui comme un mendiant et d'habiter sa propre maison sous l'escalier, sans être reconnu. Il entend sa famille le pleurer, qui le croit mort ; dans le même temps, il est maltraité, repoussé, ignoré. Mais il possède tout cela comme jamais maître ne possède sa maison - car possède-t-il les ténèbres qui reposent la nuit sur l'escalier, l'insolence du cuisinier, la morgue de l'écuyer, les soupirs de la servante la plus basse ?

    Un homme endormi se réveille à moitié en pleine nuit. Il porte alors sur lui-même un terrible regard d'acier, un regard plein de tourments. Comment survivre à ce regard ? Cela paraît impossible, même le matin ne pourra pas l'en délivrer. Et pourtant l'homme se rendort et l'oubli le sauve ; à ce regard personne, ni aujourd'hui, ni ultérieurement ne devra de réponse.