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Slow man, de Coetzee

(Aussitôt dit, aussitôt fait. Je ne suis encore qu'au milieu de ma lecture du nouveau roman de Coetzee. Il n'est pas bien épais. Demain ou après-demain, sauf imprévu, j'aurai fini. Je saurai si ça m'a plu. J'en dirai peut-être alors à nouveau quelque chose. Mais la manie du dédoublement qui possède l'auteur est contagieuse. Alors un personnage fugace prend la parole, ce lecteur que j'ai de bonnes chances de ne plus être dans quelques jours, qui n'a lu que la moitié du dernier Coetzee).

Un homme, Paul Rayment, est victime d'un accident de la circulation. Dans les moments de semi-lucidité qui suivent, sur un lit d'hôpital, s'insinuent comme une pointe les paroles du médecin : il va falloir amputer la jambe blessée. Paul est maintenant un infirme ; il prend conscience avec désespoir de sa nouvelle condition d'homme diminué, déjà vieux, seul, sans descendance, traité de façon humiliante par la société, etc. Va-t-il reprendre goût à la vie ? Une nouvelle infirmière vient s'occuper de lui, une mère de famille croate (tiens ! comme l'héroïne du chef-d’œuvre de Roth, Sabbath's Theater). Paul commence à s'intéresser à la belle et solide Marijana et à ses enfants.

Tel est le début du roman (qui vaut mieux que ce résumé) sérieusement mené et développé jusqu'ici sans trop de surprise. Je n'en tire aucun jugement hâtif : le début de Disgrace également était convenu ; l'histoire d'un professeur d'université qui couche avec une de ses étudiantes donnait une impression de déjà lu, avant que le livre ne prenne une toute autre ampleur. Dans ces premières pages, je retrouve l'art de Coetzee : la prédilection pour les autoportraits cruels non dépourvus de dérision, qu'il partage avec Kafka. Je songe à la Métamorphose (le héros de Disgrace faisait penser à Joséphine la cantatrice). Je suis pris par l'alliance entre l'allégorie et un réalisme chevillé au corps (et à ses misères) ; j'apprécie les allusions à l'art (la Photographie), l'interrogation sur l'histoire, les racines, ce que veut dire recommencer sa vie, ailleurs ou tardivement. Mais la question reste ouverte : où cela va-t-il nous mener ?

Surprise ! un nouveau personnage vient alors sonner à la porte de Paul. Elizabeth Costello, herself, fameux écrivain australien, doppelgänger féminin et très fatigué de Coetzee, héroïne progressivement aphasique de son précédent roman. Il l'avait laissée (dans mon souvenir) perdue dans les limbes d'une station balnéaire d'Autriche-Hongrie, ni vivante ni morte (avatar du Chasseur Gracchus) pendue parmi les fantômes des créations de Kafka et de Hofmannsthal.

J'en suis là : j'ai peur que le livre se perde dans la gratuité d'un jeu littéraire mais je ne désespère pas. A suivre.

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