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  • Conseils littéraires

    Avant d'oublier, peut-être définitivement, Paris ne finit jamais d'Enrique Vila-Matas, notons ici (on ne sait jamais, ça pourrait servir) les instructions à un romancier débutant que Marguerite Duras aurait données en 1974 au jeune littérateur espagnol :

    1. Problèmes de structure. 2. Unité et harmonie. 3. Thème et histoire. 4. Le facteur temps. 5. Effets textuels. 6. Vraisemblance. 7. Technique narrative. 8. Personnages. 9. Dialogues. 10. Cadres. 11. Style. 12. Expérience. 13. Registre linguistique.

  • La Chine

    (Par Vila-Matas et son Paris ne finit jamais, je lis l'article de Roland Barthes "Alors, la Chine ?", paru dans Le Monde du 24 mai 1974,  qui rend compte du séjour dans le pays "avec le groupe Tel Quel". C'est un petit chef-d'oeuvre d'incongruité ; ce pourrait être la relation écrite par le professeur Tournesol à son retour de Bordurie. Le passage sur le thé et la campagne semble avoir été recopié de Bouvard et Pécuchet ou été composé en vue de son inclusion dans le Dictionnaire de la bêtise.)

    Hormis ses palais anciens, ses affiches, ses ballets d'enfants et son Premier Mai, la Chine n'est pas coloriée. La campagne (du moins celle que nous avons vue, qui n'est pas celle de l'ancienne peinture) est plate ; aucun objet historique ne la rompt (ni clochers, ni manoirs) ; au loin, deux buffles gris, un tracteur, des champs réguliers, mais asymétriques, un groupe de travailleurs en bleu, c'est tout. Le reste, à l'infini, est beige (teinté de rose) ou vert tendre (le blé, le riz) ; parfois, mais toujours pâles, des nappes de colza jaune ou de cette fleur mauve qui sert, paraît-il, d'entrais. Nul dépaysement.

    Le thé vert est fade ; servi en toute occasion, renouvelé régulièrement (etc.)

  • Souvenirs de novembre

    Le brouillard a fait de la ville une cité des plaines du nord de l'Italie : l'angle des rues, la perspective déserte, les hauts vaisseaux des églises en brique. Levant les yeux, on verrait les avions, métal gris contre le gris plus clair du ciel ; se diriger au Nord-Ouest pour virer à la verticale de Saint-Germain, là où commence leur descente vers les pistes de l'aéroport. Le boulevard domine comme une digue le vide où coule le fleuve ; son lit bien plus mince que la vaste tranchée qu'on voit, large comme les crues et envahie par l'herbe. Les arbres plantés régulièrement le long de la promenade forment deux par deux, pour la vue, comme les montants d'un balcon ou les jambages ornementés d'une fenêtre. De ce côté-là, il y a le pont suspendu qu'on appelle encore le "pont des Allemands" parce qu'il pointe droit au Nord ; hérissé de balanciers où s'arriment les câbles qui le portent, il est dressé comme une échelle contre un mur invisible, disparaissant dans la brume qui cache la rive adverse. De l'autre côté, le talus moins haut dévale jusqu'aux parcs des belles maisons des faubourgs : c'est ici "le jardin des Finzi-Contini". Enfants, on descendait la pente très raide pour y aller jouer, échappant à la garde des ces parents pauvres ou domestiques qu'on méprisait : et dont les noms Amareni, Amargo, Amerini, Ama- etc. sembaient avaient été choisis, bien inutilement, pour conjurer le sort d'être mal-aimés.