Au Théâtre des Champs-Elysées.
(L'orchestre souffle comme un boeuf. Veut-il pousser les chanteurs par dessus la rampe ? Non ils restent là, frappés comme des mouches sur une vitre... Tintamarre : on croirait que la nef des deux amants vient de se fracasser contre les fanfares récifs de Cornouailles ; et l’œuvre a fait naufrage. Le roi Marke lève les yeux pour la première fois, après la surprise, sur Isolde infidèle : que lui est-il donc arrivé, à cette "musique sublime" ? Le fatras de l’épave gît sur la scène comme des accessoires de théâtre après la représentation. On se dit que la torche pourra resservir pour allumer le bûcher de Brünnhilde (l’invocation à l’amour y est incluse), l’arme de Melot pour équiper Klingsor. Dans la carène béante, on pourrait encore introduire des scènes entières d'autres opéras de Wagner : à Kareol, Parsifal débarquera du bateau et ses soins seront plus efficaces ; Wotan aura fait ses adieux à Isolde à la fin du deuxième acte et, au troisième, tous sauteront dans le feu, les fautes des uns et des autres ayant été pardonnées ou rachetées adéquatement.)
Commentaires
J'ai adoré, mais peut-être aurais-je aimé tout autant cet opéra s'il avait été joué à vue par un orchestre de seconde zone à 10h du matin sur la place du village.
Tu n'es pas le seul à avoir aimé : les comptes-rendus sont presque partout dithyrambiques... Je crois bien que j'ai le goût faussé par mon expérience bayreuthienne de cet été (il y a pire malheur !)... j'y ai vu Tristan dans une mise en scène magistrale et, je crois, très mal-aimée de Marthaler... Là-bas l'orchestre est couvert et les chanteurs le dominent sans forcer et mènent le drame... bref la représentation du TCE m'a d'abord cassé les oreilles et, à partir du II, j'ai été vraiment malheureux (Dieu sait si j'aime cette musique !) : pas de poésie, aucun frisson, un méchant cirque gueulard... j'espère que ce n'est pas définitif !