Le début de The Princess Casamassima de James rappelle les ouvertures des romans de Dickens : le livre et le héros commencent pour ainsi dire ensemble, accédant à l’existence dans une seule irruption : le monde se saisit du héros et le héros surgit dans le monde ; la convocation instaure un dilemme que la suite s’ingéniera à faire résonner jusqu’au règlement final. (C’est le schéma archétypique, si l’on veut, du Procès de Kafka).
Ici la force préhensile a les traits de la terrible Mrs Bowerbank, gardienne de prison de son état, trop massive pour le pauvre salon de Miss Pynsent à qui elle est venue apporter une odieuse nouvelle : la mère au moment de mourir voudrait voir une dernière fois son enfant. Alors que la modiste a envoyé chercher le petit garçon qu'elle a recueilli pour le montrer à sa visiteuse, les deux femmes discutent le cas, qu'elles récapitulent ainsi : la mère est une meurtrière, elle a tué un lord, l’enfant est le fruit de leur liaison illégitime et la raison du crime.
Cependant il faut bien avouer que Miss Pynsent a caché à son pupille la moitié de l'histoire : elle a suggéré une ascendance aristocratique, mais elle ne lui a rien dit de sa mère en prison. Que faire ? La morale et la logique veulent qu’on rétablisse l’équilibre : l’enfant ira faire la dernière visite ; mais, ce faisant, ce n’est pas seulement la symétrie qu’on restaure, c’est la contradiction qu’on installe au cœur de l’existence même du malheureux Hyacinth Robinson.
(A la fin du roman, soumis aux ordres d’un groupe terroriste, le prolétaire Hyacinth doit assassiner un grand personnage ; le dernier argument qui le retient est celui de la répétition : il ne peut recommencer le geste de sa mère. Puisqu’il incorpore en quelque sorte les deux côtés du problème, la solution est à trouver en lui-même.)