Je ne sais pas comment cela est fait. Ce doit être le même procédé que ces tableaux doubles, que vous avez déjà vus sans doute ; l'une et l'autre image ont été découpées et collées en fines lanières verticales sur des baguettes taillées en biseau : selon qu'on regarde de droite ou de gauche, par le côté, on voit la première ou la seconde figure. Ou bien : ces vignettes plastifiées où plusieurs moments successifs sont inscrits, semble-t-il, dans la fibre de l'image ; selon l'angle sous lequel on la regarde, comme on la fait pivoter, l'oiseau s'envole ou le footballeur (ainsi que son nom l'indique) donne un coup de pied dans la balle. Ici la toile est peinte de façon que deux moments y coexistent. Cependant le mouvement est presque invisible, il apparaît au spectateur immobile face au tableau comme un léger vertige, un flou dont il ne peut deviner s'il est dans son regard ou dans la chose regardée. Le présent est scindé de façon quasi imperceptible en deux moments, passé et avenir, qui tendent l'un vers l'autre dans la vibration de la couleur et de la forme. Quant à la scène représentée, c'est le principe de la "pièce dont on aurait ôté un mur", comme au théâtre. Quelques personnages sont rassemblés debout autour d'une table et de chaises vides, peut-être d'un lit. Elle ressemblerait alors assez à la "Chambre de la malade" de Munch.