Folies de femmes, de Stroheim.
Karamzin, assis, baisse la tête ; il porte les deux mains à son front et cache ses yeux derrière. Subrepticement il a mouillé le bout de ses doigts et il les secoue maintenant pour faire tomber des gouttes sur la nappe devant lui. Trompée par le spectacle, la bonne s'apitoie et, devant ces fausses larmes, ravale ses reproches (Pourtant Karamzin ne modère pas ses effets et il agite les mains comme on chasse les mouches).
Karamzin et ses deux comparses se font passer pour des aristocrates russes. Ils vivent sur un grand pied à Monaco trafiquant de fausse monnaie et tentent d'escroquer la femme du consul des États-Unis. Les scènes de rue évoquent un vaste carnaval et la fraude des trois voyous déborde d'allégresse (on songe à Don Giovanni, d'autant plus que Karamzin croise sur son chemin quelques statues du Commandeur : raides et sombres à proportion qu'il est vif et hilare).
L'affaire tourne mal pour les escrocs : les deux femmes sont démasquées (la police fait tomber leur perruque) mais elles éclatent de rire. Karamzin ne s'en tire pas si bien. Il est tué par un père dont il voulait séduire la fille : mais, avant que son cadavre ne soit précipité ignominieusement à l'égout, un dernier plan nous laisse voir son visage sous le sac, avec les lèvres largement retroussées et les dents éclatantes du rictus.