Au cinéma, revu They live by night de Nicholas Ray.
Tout le monde a ses raisons et, sans trop y penser, les uns utilisent les autres pour servir leurs intérêts : c'est ainsi que les jeunes et tendres amants finissent victimes des adultes endurcis qui les enrôlent dans leurs intrigues. Parmi ceux-là, il y a la femme d'un détenu, prête à tout pour obtenir la libération de son mari parce que la vie passe, le temps presse et que l'un et l'autre seront bientôt vieux.
Dès qu'elle a croisé la route de Keechie et de Bowie, elle leur a témoigné de l'hostilité : peut-être par jalousie, peut-être par aversion pour un destin qui lui rappelle le sien à son début. Enfin l'occasion se présente : le couple en fuite s'est réfugié chez elle ; elle obtiendra l'élargissement de son homme en livrant à la police le jeune bandit. On la voit négocier durement avec l'officier ; à gauche du bureau, le mari entravé garde la tête baissée. Pendant qu'on le remmène (dans l'attente de la réalisation du forfait), la femme lui jette un regard implorant ; les grands yeux noirs, inquiets, guettent sans doute une approbation, en vain : a-t-elle tout perdu, croyant réussir ? (Peu de temps après, il lui faudra boire le calice jusqu'à la lie et convaincre Bowie, qui veut s'enfuir, d'aller voir une dernière fois sa jeune femme endormie pour que, sur le chemin de la chambre, la police puisse l'abattre : songe-t-elle alors à son propre sort, à cet autre regard qui restera peut-être lui-aussi le dernier ?)