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L'autre appartement

Je suis sorti tôt ce matin et j’ai rejoint à pied mon second appartement. La nuit n’était pas terminée, le lit était fait et j’aurais pu m’y allonger jusqu'à l’heure définitive du réveil. Tout ici est bien aménagé et si bien entretenu qu’on peut s’y installer dans l'instant ; il n’y a que ce reste de froid et la pâleur qui hante les lieux déserts et qu’il est difficile de chasser. Je viens rarement ici. Qu’ai-je à faire d’un autre logement, tout proche de celui que j’habite ? je n’en ai pas l’usage. Je vais et je viens de la chambre à la cuisine sans m'asseoir, je traverse rapidement le bref corridor, je passe les deux ou trois seuils qui marquent l'espace, je m'appuie au montant de la fenêtre et je regarde dehors les premières lueurs du jour. Il y a longtemps sans doute que je possède cet endroit. Il me semble que son existence résulte d'un malentendu ancien, que j’en ai fait l’acquisition à l’occasion d’un déménagement mouvementé, qu’il y a eu une erreur dans la correspondance entre l’ancien et le nouvel état et qu’il est demeuré de la soustraction ce reste irrécusable. J’oublie à la longue jusqu’à l’existence de cette seconde demeure et peut-être finirai-je par en perdre l’adresse et, avec clés et codes, le moyen d’y entrer. Mais, quand je m'en crois débarrassé, le souvenir de l'habitation vide revient m’importuner : je m’inquiète de la dépense inutile et je me désole de l’aberrant gaspillage que représentent ces pièces inoccupées. Alors c’est tout comme si j’habitais pendant une heure le logement vacant. Je ne sais pas comment m’en défaire.

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