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2666

2666, de Roberto Bolaño.

Le roman n'existe que dans sa partie mexicaine. Les épisodes européens manquent de substance, sont fastidieux, d'une fantaisie inconsistante ; mais s'acheminent vers la région terrible : dans la ville de Santa Teresa, dans le nord du Mexique, des femmes sont sauvagement assassinées. Les cadavres sont retrouvés aux abords de la ville ; les mots de la médecine légiste décrivent avec précision les tortures que les corps ont subies. A ces morts constatées correspondent (ou ne correspondent pas) des disparitions, presque aussi nombreuses, des êtres manquants. D'impossibles enquêtes, toujours recommencées, interrompues, douteuses, trouvent là leur origine et ici leur fin (ou réciproquement).

J'ai dit (à Loya) que je voulais qu'il continue ses recherches. Pendant un moment, il a eu l'air de réfléchir à ma proposition, ou plutôt il a eu l'air de chercher les mots qu'il avait à me dire. Ensuite il a dit qu'il ne souhaitait pas que je perde ni mon argent ni mon temps. Que, telle qu'il la voyait, l'affaire était classée. Vous voulez dire que vous croyez que Kelly est morte, lui ai-je crié. Plus ou moins, a-t-il dit sans rien perdre de son calme. Comment ça plus ou moins ? ai-je crié. On est mort ou on n'est pas mort, putain de Dieu ! Au Mexique, on peut être plus ou moins mort, m'a-t-il répondu très sérieusement. Je l'ai regardé avec l'envie de le gifler. Comme ce type était froid et distant. Non, lui ai-je dit, presque en détachant chaque syllabe, ni au Mexique ni nulle part ailleurs sur la planète quelqu'un peut être plus ou moins mort. Arrêtez de parler comme un guide touristique (...). J'en ai marre des Mexicains qui parlent et se comportent comme si tout ceci était Pedro Paramo, lui ai-je dit. C'est peut-être bien cela, a dit Loya.

Ailleurs des livres sont l'indice ou la preuve elle-même que nous avons perdu celui que nous cherchons (ou que nous devons continuer à le chercher) :

(...) j'ai été chez lui, et j'ai rien vu qui me fasse penser qu'on l'aurait enlevé. Il est parti parce qu'il a voulu s'en aller. Non, entendit-elle dire au jeune homme. S'il était parti de lui-même, il aurait emporté ses livres. Les livres pèsent lourds, dit Mary-Sue, et puis on peut toujours les racheter. Il y a plus de librairies en Californie qu'à Sonoita, dit-elle, voulant faire une plaisanterie, mais elle s'aperçut immédiatement que cette affirmation manquait de tout sens de l'humour. Non, je ne fais pas allusion à ces livres-là, mais aux siens, dit le jeune homme. Aux siens ? dit Mary-Sue. A ceux qu'il a écrits et qu'il a publiés. Ceux-là, il ne les aurait pas abandonnés, même si ç'avait été la fin du monde. (...) Mary-Sue pensa que les livres signés d'Hernandez Mercado ne devaient pas peser bien lourd et qu'il n'aurait jamais pu les racheter en Californie.

(Trad. Robert Amutio)

 

Commentaires

  • La première section est-elle un épisode européen ?
    C'est pour moi l'une des plus belles ? La preuve qu'il est encore possible d'écrire des histoires d'amour.

  • Vraiment ? Alors je l'ai complétement manquée... s'agit-il bien des aventures des quatre critiques ? je ne saurais dire qui était qui et comment finissaient leurs amours.

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