The Victim, de Bellow.
Leventhal travaille pour un modeste magazine à New York. L'été est étouffant. Il est seul. Sa femme passe quelques semaines chez sa mère. Deux événements désagréables viennent alors perturber sa solitude. Son neveu est gravement malade et, en l'absence du frère de Leventhal, sa belle-soeur fait appel à lui. Et puis, un soir : une espèce de clochard le prend à partie. L'homme se fait reconnaître ; c'est une vague et ancienne relation, un certain Allbee. Pendant plusieurs jours, Allbee continue de harceler Leventhal ; expliquant qu'il le rend responsable de son licenciement et des malheurs qui ont suivi, incluant dans ses griefs la mort accidentelle d'une épouse bien-aimée... Il y a des années, alors que Leventhal cherchait du travail, Allbee l'avait recommandé auprès de son patron, Rudiger. L'entretien s'était mal fini ; Leventhal s'était emporté. Ce fut tout.
L'incident d'alors et l'accusation présente sont sans proportion mais Leventhal se laisse peu à peu gagner. Il finit par accueillir Allbee chez lui (alors que le type est odieux, ivrogne, antisémite : l'antisémitisme joue un rôle à rebours dans l'accusation ; Allbee prétend que Leventhal aurait voulu se venger d'une remarque désobligeante en provoquant volontairement un esclandre chez Rudiger).
Leventhal est troublé par un sentiment de culpabilité diffus, une forme de compassion, une paranoïa qui l'empêche d'écouter les conseils de ses amis et de juger à leur juste valeur les exigences d'Allbee. Mieux il est près de voir dans Allbee une forme de double qui le renvoie aux années où il connut lui-même la pauvreté et l'abandon. La mort de son neveu et le chagrin de sa belle-soeur qu'il imagine hostile renforcent l'impression d'accablement et d'exclusion. C'est dans la description de ce sourd sentiment que le roman est le plus impressionnant : s'y confondent le souffle d'un appel, les mauvais sommeils, une douleur physique (avec la fièvre et la torpeur de la saison), la crainte de la folie... (La ville provoque une richesse de sensations sans suite ni raison, éclats et sons qui fixent dans le présent et le réel le vertige de Leventhal. Un soir, une guitare : from the tavern across the way came the slow notes of a guitar, the lighter carried away, the deeper repeated tranquilly. Ou bien le bruit d'une caisse au restaurant : The musical crash fo the check machine filled their ears as they waited their turn at the cashier's dazzling cage.)
Commentaires
Et ça se termine comment ? Qui finit par tuer l'autre ?
il y a dans l'avant-dernier chapitre tentative interrompue d'un suicide à deux "décidé unilatéralement" (comme le fait remarquer Leventhal avec humour)