A défaut d'établir un classement des films sortis en 2005, les premiers jours de 2006 ont au moins été l'occasion retardée d'en voir deux (dont on a parlé) : A History of violence de Cronenberg et Caché de Haneke.
Si on va au cinéma pour avoir peur, le gagnant est le Haneke (en l'occurrence la mise en scène de Cronenberg provoque comme toujours une parfaite anesthésie).
Car le sentiment de culpabilité (le moteur de Caché) est un puissant ressort de la terreur (qu'on le vive en victime, dans l'expiation, comme l'orphelin, fils d'immigrés, joué par Bénichou ou en bourreau, dans le refoulement, comme la vedette de télévision jouée par Auteuil). Cauchemar de l'un et suicide de l'autre : voilà la fin du processus implacable (pas de conciliation, sauf peut-être la rencontre entraperçue, dans la scène finale, entre les deux (petits-)fils.) Logique de tragédie malgré des milieux et des personnages décrits et incarnés de façon hyperréaliste (les beaux quartiers et les HLM de Paris, la télévision, l'histoire contemporaine). Réalisme tordu par un dispositif quasi-fantastique (qui demeure en tout cas inexpliqué et sans justification) : les vidéos énigmatiques que reçoit le couple Auteuil/Binoche ; classiquement la mauvaise conscience sous la forme d'un regard pointé sur soi, muet, fixe, incorporel, impossible à fuir.