Au musée d'Orsay. Exposition, L'Empire du Brésil et ses photographes.
Deux vues somptueuses de la campagne à Goianas par Auguste Stahl : un chemin à travers un champ de cannes à sucre vers le village au loin ; un groupe de bâtisses, façades blanches et corps noirs, avec le détail lumineux de chaque tuile et des pinacles.
Devant les images de Rio au dix-neuvième siècle, je ne peux que repenser au roman de Machado de Assis Dom Casmurro (trad. AM Quint). C'est dans une de ces rues peut-être que vivaient, dans des maisons mitoyennes, les deux enfants Bento et Capitou ; derrière une de ces fenêtres qu'eut lieu la mémorable séance de coiffure ; c'est dans ce jardin public que Bento, à l'instigation de la rusée Capitou, demanda à José Diaz de l'aider à échapper au séminaire ; et, dans la salle suivante, on croise même l'Empereur aux pieds duquel Bento rêva un moment de se jeter, pour qu'il vienne voir sa mère et la détourne du vœu de donner son fils à l'Eglise. Il est assis là parmi la flore de son Empire ; ses yeux sont si clairs et bienveillants qu'on ne doute pas qu'il aurait accepté, et convaincu Dona Gloria de faire plutôt de son fils un médecin.
Grand émoi dans le voisinage : « l’Empereur est entré chez Dona Gloria ! Et pourquoi donc ? Et pourquoi pas ? » (...)
Alors l'Empereur donnait de nouveau sa main à baiser, et sortait, suivi de nous tous ; dans la rue, un monde fou, les fenêtres bondées ; un silence surpris ; l'Empereur montait dans son carrosse, se penchait et faisait un geste d'adieu, en disant encore : « la médecine, notre Ecole ». Et le carrosse partait au milieu de l'envie et des remerciements.