J'assiste à une représentation de Tannhaüser à l'opéra Bastille. Mais je quitte le fauteuil que j'occupe, à côté de deux ou trois amis, pour me promener dans les allées. Au passage je reconnais certains collègues avec qui j'échange ou non des signes de connivence. Je profite de ce que le parterre n'est pas comble pour m'asseoir ici ou là et faire l'expérience des qualités pour l'oeil et l'oreille d'autres situations dans la salle. Mais les places ne sont pas fameuses, quand on pense au prix qu'elles coûtent ! trop latérales, trop renfoncées ou au contraire trop élevées et coincées sous un plafond. Vus d'ici, l'ouverture de scène est réduite à une fente, les surtitres sont invisibles ou minuscules. Mes pérégrinations me laissent peu de temps pour profiter du spectacle ; je comprends cependant que la mise en scène est au moins très moderne, et va jusqu'à se passer par moment de musique, remplacée alors par des dialogues diffusés par haut-parleur. La conception est aussi très marquée politiquement : les appels à la grève tiennent lieu d'appels à la grâce, me dit-on. Je suis maintenant au premier rang, le plateau est barré par un escalier dans le sens de la profondeur. Voici la scène de la Gorge-aux-loups (je me trompe, est-ce alors le Freischütz ?). Le diable apparaît, barbu et grimé. Au moment des saluts les chanteurs montent et descendent, apportant ou recevant des bouquets qu'ils trouvent tout au fond en coulisse ou qu'on leur tend par-dessus la rampe ; il n'y a pas de fosse d'orchestre. Chacun y va alors de ses commentaires : on déplore que les deux interprètes aient des voix si proches qu'on les confonde et, avec elles, les rôles de Vénus et d'Elisabeth, ou bien de Brangäne et d'Isolde. Je suis seul à applaudir ce gros homme qui se déplace lourdement les bras collés au corps. On m'explique : chaque personnage symbolise une oeuvre romanesque ; les jeux de scène et les péripéties rendent compte des vogues intermittentes et de la succession des mouvements littéraires.
Commentaires
Tu nous donneras le nom de l'höpital dans lequel tu es interné, pour que nous puissions te rendre visite...
Oh l'adresse n'a pas changé... tu es le bienvenu !