La maison, sans étage, est enfouie dans la pente parmi les immeubles de la rue Raynouard comme un vestige de la ville disparue. De ce côté-ci elle donne de plain-pied dans un petit jardin peu soigné ; de l’autre elle surplombe de trois niveaux une rue plus basse. L’intérieur, déshabité, refait à neuf, ne dit pas grand-chose de la vie de ses anciens occupants. Balzac a séjourné des années dans l’appartement du haut et a écrit ici plusieurs romans fameux. Le musée réunit quelques objets qui lui ont appartenu. Il y a surtout sa table de travail : elle est petite mais ses pieds entravés sont liés fastueusement par une barre en torsade (assis on doit être tenté de jouer avec) ; derrière, le fauteuil à haut dossier paraît trop grand pour la table, proportionné plutôt à la grosse tête sculptée par David d’Angers, qui est posée sur un socle élevé, debout contre le mur.
(Mais si l’esprit des lieux existe, il est avant tout fomenté par les gardiens : un par pièce (ou presque) dans les cinq salles exiguës, ils occupent tout l'espace. On entend des éclats de voix. L’un d’eux semble fou de colère ; maintenant il se tait et se carre au milieu d’une pièce ; de l’autre côté du mur, ses collègues indolents ou contrits.)