Majestueux et délicats dans leur cotte de marbre, les trois ou quatre monuments du Campo dei Miracoli trônent sur la pelouse comme des boîtes d'ivoire arrangées sur un tapis. Mais la foule ne se laisse pas éblouir. La Tour penche. Sa réputation suffit à transformer le champ en une fête foraine, en une kermesse où l'herbe rase a des poux. La Tour est un grand huit du treizième siècle, tout en pierre. Mais les sensations qu'elle donne sont subtiles : le plus grand vertige, c'est, quand on y monte, d'être, à chaque révolution du colimaçon intérieur, rejetés par des transitions insensibles successivement vers l'une puis vers l'autre paroi.